Témoignage de Sophie Mallet, recueilli le 1er juin 2018

Je me suis établie à Pen Bé en 2001, quand, à l’approche de la retraite , mon époux, Frank, a désiré venir vivre ici, dans ce coin qu’il fréquente depuis toujours, car, enfant, il y passait ses vacances .

C’est lui qui a construit notre maison à Bas-Village. Moi, lors de nos premières balades, j’ignorais que Pen Bé faisait partie de la commune d’Assérac .

C’est Frank qui m’a aidée à connaître les habitants, car aucune famille ne lui était étrangère lorsqu’on s’est installé dans notre maison. Et comme je travaillais encore en 2001, ce n’était pas simple d’entrer en relation avec les gens d’ici, ancrés depuis longtemps sur ce bout de terre. Les personnalités y sont fortes, elles ne se laissent pas apprivoiser au premier regard par les nouveaux arrivants !

J’aime le traict de Pen Bé, ce lieu magique coupé du monde. Je m’y sens immergée, en pleine nature, au plus près des oiseaux, des odeurs… Ce traict vaseux aux teintes pastel est très différent du traict de Pen Bron, sablonneux, aux couleurs plus intenses.

D’ailleurs,on peut mesurer l’envasement croissant de la baie par l’implantation des étendues herbeuses.

Par vent d’est toutefois, le traict de Pen Bé arbore des couleurs plus franches dont je profite en parcourant le sentier côtier. Les verts, bleus, gris, varient selon les saisons, le temps qu’il fait, la mer haute ou basse… Les senteurs sont multiples : bien sûr, il y a celle de la mer, des algues, de la vase, mais aussi l’odeur de noix de coco des ajoncs en fleurs, celle des troènes, qui me ramène au temps de mon adolescence, lorsque je jouais au tennis. Les haies protégeant les courts étaient des troènes.

Et se mélangent à ces parfums que j’ai la chance de respirer sitôt sortie de ma maison, les odeurs de la campagne, des vaches, du fumier, de l’herbe coupée. Quel privilège !

 Quel bonheur également d’écouter le silence de ces lieux à l’écart de la civilisation, puis, d’entendre, d’octobre à avril, les bernaches qui «  grougroutent », les aigrettes dont le cri rauque ne me paraît pas à la hauteur de leur élégance, les courlis qui semblent me siffler…

Les goélands sont beaucoup plus rares.

 Les oiseaux de terre, que j’identifie moins car ils sont plus petits, moins visibles, dont j’ignore souvent le nom, croisent leurs chants à ceux des oiseaux de mer.

 La mer, elle, est silencieuse dans le traict. Si l’on veut l’écouter, il faut « monter » à Pen Bé un jour de grand vent.

 En octobre, au crépuscule, j’entends aussi parfois le brame du cerf dans les bois entre Bas-Village et Kermalinge.

J’aime Assérac pour la diversité de ses paysages: j’aime le marais côtier mais aussi celui du côté de l’Avaloué, j’aime le cheminement aménagé dans les dunes de Pont-Mahé, j’aime le bourg qui a gardé son charme d’antan, j’aime les petites routes sinuant dans la campagne…, se partageant l’espace avec les chênes, les châtaigniers, les ajoncs, les bruyères, les ronces… les prunelliers, les aubépines

Parmi la beauté de cet environnement naturel, je déplore cependant la multitude de panneaux de signalisation, informations, interdictions…qui fleurissent en toute saison sans faner à l’approche de chaque village et notamment autour de la pointe de Pen Bé ; la transformation progressive de l’environnement naturel en parc public ; la place de l’éco pâturage qui ne laisse parfois des chemins empruntables que par les amoureux en raison de leur étroitesse ; l’interdiction de passer au Frostidiéqui appartient pourtant au Conservatoire du littoral ; l’impossibilité de rejoindre Pont d’Armes par le chemin longeant les salines qui existait autrefois ; la coupe de cinq ou six pins Insinis entre la Pointe noire et Fontaine Maria au nom de l’absence de ce type d’essence d’arbres auparavant (quand, avant ou après JC? ) dont j’ai surnommé l’emplacement : l’Anse de la Honte.